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Projet de constitution russe pour la Syrie

Projet de constitution russe pour la Syrie : des prérogatives présidentielles transmises au Premier ministre

La résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU fixe le mois d’août pour proposer une nouvelle constitution.
Des dizaines de comités émanant des organisations internationales s’activent en coulisses pour proposer un nouveau texte, mais ce sont les Russes et les Américains qui sont les plus attendus.
Selon Al-Akhbar, la nouvelle mouture russe propose de nombreux amendements ainsi que de nouveaux articles par rapport à la constitution de février 2012.
Art 1 « république syrienne » au lieu de « arabe syrienne ». La proposition russe enlève également l’art 3 qui stipule que « la religion du président de la république est l’islam » et que « la jurisprudence islamique est la principale source de droit ».
Nouvel article: « les appareils d’autonomie culturelle  kurde et leurs organisations utilisent la langue arabe et kurde comme langues égales ». Chaque région, selon la loi, aura le droit d’utiliser la langue parlée par la majorité de la population locale après un « référendum local ».
Nouvel apport significatif: « Assemblée des régions ». Ce sont les administrations locales qui existent actuellement mais pourvue de prérogatives élargies, restreignant ainsi la centralité de l’Etat.
Est également instituée une autonomie culturelle kurde.
L’assemblée des régions prend en charge, aux côtés de « l’Assemblée du peuple » (nouveau nom du Conseil du peuple), le travail législatif, afin de « garantir la participation des représentants des unités administratives dans le travail législatif et la gestion du pays ». Ses séances se tiennent de façon indépendante par rapport au Parlement. L’assemblée des régions pourra également tenir une séance générale pour voter, ou encore écouter le Premier ministre, le Président de la république ou des dirigeants de pays étrangers.
Les relations entre les deux assemblées sont régies par un article de la nouvelle constitution.
Des prérogatives supplémentaires sont apportées aux membres du conseil du peuple, comme la nomination des membres de la haute cour constitutionnelle (actuellement prérogative du président) ainsi que le gouverneur de la « Banque nationale » (nouvelle appellation de la banque centrale) mais aussi le démettre de des fonctions. Le projet russe met également fin à la division actuelle du Parlement (actuellement la moitié des membres provenant des travailleurs et des paysans, et la deuxième moitié provenant des autres catégories).

Selon le projet russe, le président peut se porter candidat à condition d’avoir 40 ans et d’être détenteur de la nationalité syrienne. Les autres détails actuels ont été enlevés (comme la nécessité d’être né de 2 parents syriens et d’être marié à une Syrienne).
Le président serait élu pour 7 ans renouvelable une seule fois. Il prête serment devant les deux assemblées.
Un nouvel article stipule que le président « se charge de faire l’intermédiaire entre les autorités de l’Etat et entre l’Etat et la société ». Aucun pouvoir législatif ne lui est attribué. Il demeure le commandant en chef des armées. En cas d’attaque, il peut prendre toutes les mesures pour y faire face et « informe les deux assemblées ». Il peut décréter la mobilisation générale mais doit demander l’aval de l’assemblée des régions. Notons que cette dernière remplace le chef de l’Etat en cas d’incapacité ou de vacance du pouvoir et après que l’incapacité du Premier ministre de le remplacer est avérée.

Concernant le Parlement, l’assemblée du peuple, un article dispose que la nomination des postes de vice-Premier ministre et vice-ministres se fait en « représentation relative de toutes les catégories confessionnelles et nationales des habitants de la Syrie ». Certains de ces postes sont réservés aux minorités nationales et confessionnelles.

Un tiers des membres de l’assemblée des régions peut voter une motion de censure à l’encontre du gouvernement (l’assemblée du peuple le peut également. Le projet russe enlève ce qui a été introduit dans la constitution de 2012, à savoir que « le Premier ministre, les vice-PM et les ministres sont responsables devant le président de la République » et que ce dernier « peut les poursuivre en justice ». (art 121 et 124).

Le projet russe ajoute 4 membres au sein de la cour constitutionnelle, passant ainsi à 11 membres, « nommés par l’assemblée des régions », alors qu’aujourd’hui, c’est le président de la république qui les nomme » (décret 140). Selon la proposition russe, la législation précédente reste en vigueur jusqu’à amendement, en conformité avec la cour constitutionnelle.

Concernant le service militaire, la nouvelle mouture propose quelque chose de plus large et plus général: « les citoyens de la Syrie effectuent le service militaire conformément à la loi », alors que la constitution de 2012 dispose que « le service militaire obligatoire est un devoir sacré et régi par la loi » (art 46).

La proposition russe effectue un glissement vers une économie libérale. Est instituée « la liberté de l’activité économique » et la propriété privée est reconnue. L’Etat crée les conditions favorables pour développer l’économie et garantir la liberté d’entreprendre. Il garantit également la libre circulation des marchandises et des capitaux. Les ressources naturelles appartiennent au peuple ». L’actuelle constitution dispose que « l’économie nationale consiste à développer l’activité économique publique et privée via des plans économiques et sociaux ainsi que par des politiques étatiques visant à réaliser la croissance économique et la justice sociale. L’Etat investit et supervise les ressources naturelles… (art 13).

Modification du serment présidentiel. Les Russes enlèvent toute majesté ou « nationalisme arabe ou socialiste ».
Actuellement: « Je jure par Dieu le Grand, de respecter la constitution et les lois du pays ainsi que son régime républicain, de considérer les intérêts et les libertés du peuple, de préserver la souveraineté de la patrie, son indépendance, sa liberté de défendre son territoire, et de travailler à la réalisation de la justice sociale et à l’unité de la nation arabe ».
Proposition: « Je jure de me conformer à la constitution et aux lois du pays, de respecter et de protéger les droits et libertés de l’homme et du citoyen, de défendre la souveraineté de la patrie, l’indépendance et la sécurité du territoire, de me comporter toujours conformément aux intérêts du peuple ».

Dans la proposition russe, apparaît le terme de « organisations religieuses ». Un article stipulerait de respecter « l’ensemble des religions et organisation religieuses… Celles-ci sont égales devant la loi ».

Cet article a été traduit et édité par Syria Intelligence (Al-Akhbar, par Elie Hanna, le 24 mai 2016) 

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