Les discussions entre la Turquie et les Etats-Unis pour finaliser un accord sur Manbij se sont accélérées. L’armée syrienne a déployé de nouveaux renforts sur les lignes de front au nord de Manbij pour bloquer une éventuelle offensive turque. La « zone de sécurité » dans le nord de la Syrie souhaitée par la Turquie toujours en réflexion. Le président Erdogan a reconnu publiquement pour la première fois des échanges « à bas niveau » entre les services de renseignement syriens et turcs.
En marge d’une réunion des ministres des affaires étrangères des pays membres de la coalition anti-djihadiste qui s’est déroulée le 6 février à Washington, le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Çavuşoğlu a déclaré que la mise en œuvre de la feuille de route visant « à débarrasser la ville de Manbij des éléments du YPG s’était fortement accélérée avec le changement d’attitude des Etats-Unis ». La Turquie travaille en collaboration avec les Etats-Unis pour déterminer qui dirigera Manbij et quelles forces de sécurité resteront dans la ville une fois que les milices kurdes YPG se seront retirées.
« Il y a eu une accélération par rapport au passé… En particulier, l’administration américaine et le secrétaire d’État Mike Pompeo demandent la mise en œuvre immédiate de cette feuille de route ». En dépit des progrès réalisés, Çavuşoğlu a toutefois déclaré que la feuille de route « doit être mise en œuvre intégralement et immédiatement », en tenant les États-Unis responsables du ralentissement de la feuille de route.
Renforcement des positions de l’armée syrienne au nord de Manbij
Parallèlement, l’armée syrienne a déployé cette semaine de nouveaux renforts avec l’arrivée de la 1ère Division blindée sur les lignes de front au nord de Manbij. L’armée syrienne n’est cependant jamais rentrée dans la ville de Manbij comme annoncé par le Commandement général des forces armées le 28 décembre dernier. La ville de Manbij est toujours contrôlée par le Conseil Militaire de Manbij (CMM).
La police militaire des forces armées russes avait étendu le 25 janvier dernier son périmètre de patrouille le long des lignes de front partagées avec les rebelles de « l’armée nationale » jusqu’à l’Euphrate. Les patrouilles avaient débuté le 8 janvier autour de Arimah à l’ouest de Manbij.
L’arrivée des renforts de l’armée syrienne et l’extension du périmètre de patrouille de la police militaire russe visent à bloquer toute offensive militaire turque dans cette partie de la province.
La « zone de sécurité » dans le nord de la Syrie et la mise en place du retrait des forces américaines toujours en réflexion
Au sujet d’une éventuelle zone de sécurité dans le nord de la Syrie, Çavuşoğlu a déclaré que des idées concrètes n’ont pas encore émergé sur la question et que la Turquie tient des pourparlers avec la Russie et travaille en coordination avec les États-Unis.
Le ministre turc des Affaires étrangères a également déclaré qu’Ankara et Washington menaient des efforts conjoints concernant le retrait des troupes américaines de Syrie et les préoccupations sécuritaires de la Turquie. Une force de mission conjointe a été formée entre Ankara et Washington pour coordonner le retrait de ce dernier de Syrie.
Lors de la réunion des ministres des affaires étrangères des pays membres de la coalition dirigée par les États-Unis pour vaincre l’Etat islamique, Çavuşoğlu a appelé à un effort coordonné pour éliminer les restes du groupe terroriste en Syrie et le retrait des troupes américaines de la région. « Il est essentiel d’éviter le vide qui pourrait être exploité par les terroristes pour saper l’intégrité territoriale de la Syrie et la sécurité nationale de ses voisins », a-t-il déclaré lors de la réunion.
Le secrétaire d’État américain, M. Mike Pompeo, a souligné à la coalition que les États-Unis continueront également de travailler à la stabilité en Irak et en Syrie. « L’annonce du président Trump sur le retrait des troupes américaines de Syrie n’annonce pas la fin du combat. Nous continuerons à travailler à vos côtés », a-t-il déclaré aux membres de la coalition. La coalition de 79 membres avait été fondée en 2014 pour lutter contre la menace de l’Etat islamique en Syrie et en Irak.
Erdogan : la Turquie maintient des contacts de bas niveau avec la Syrie
Dans une interview accordée dimanche à TRT World News, le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré que la Turquie avait maintenu des contacts avec le gouvernement syrien malgré sa rupture diplomatique avec le président syrien Bachar al-Assad.
« La politique étrangère avec la Syrie se poursuit à un niveau inférieur », a-t-il déclaré à TRT World News, ajoutant que les services de renseignement fonctionnaient différemment des dirigeants politiques. « Les leaders peuvent être éliminés. Mais les services de renseignement peuvent communiquer dans leur intérêt », a dit le président Erdogan. « Même si vous avez un ennemi, vous ne devez pas rompre les liens. Vous en aurez peut-être besoin plus tard. »
Les commentaires du président Erdogan représentent une première confirmation publique sur des échanges directs à bas niveau entre Ankara et Damas.
Sommet tripartite Russie-Turquie-Iran le 14 février à Sotchi
Par ailleurs, le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Çavuşoğlu a déclaré que Sotchi accueillerait le sommet Russie-Turquie-Iran sur la Syrie le 14 février prochain.
Les pourparlers entre les présidents russe, turc et iranien seront axés sur la situation dans la zone de désescalade à Idlib et sur la manière de gérer le processus de retrait américain et de parvenir à une stabilité permanente en Syrie grâce à une coordination avec les pays voisins et les parties concernées.
Une délégation turque des ministères des Affaires étrangères et de la Défense s’était rendue ce dimanche 3 février à Moscou pour discuter en amont de la question d’Idlib.